Puis-je ĂŞtre locataire de ma sci ?

Ma deuxième maison est chère mais je ne veux pas la louer à des étrangers.

J’ ai une bonne idĂ©e : je vais la vendre Ă  mon SCI qui me la louera.

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Je serai en mesure de déduire les frais de la propriété.

Je suis sĂ»r que personne n’y a encore pensĂ©.

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Rappel des principes

Il est connu que la valeur locative des biens immobiliers non loués doit être intégrée dans le revenu du propriétaire.

Une seule exception : les locaux résidentiels.

Article 15 II CGI : « Les revenus provenant de logements dont le propriĂ©taire rĂ©serve la jouissance ne sont pas soumis Ă  l’impĂ´t sur le revenu ».

Par conséquent, la valeur locative de ma résidence secondaire et de ma résidence principale ne sont pas imposables.

La conséquence mécanique : je ne peux déduire aucune des dépenses afférentes à ces biens en vertu du principe « aucune déduction sans revenu ».

Article 13 CGI : « 1. BĂ©nĂ©fice imposable ou revenu est l’excĂ©dent du produit brut, y compris la valeur des bĂ©nĂ©fices et des prestations en nature, sur les dĂ©penses engagĂ©es pour l’acquisition et la prĂ©servation des revenus.

‘ Si je vends ma rĂ©sidence principale ou secondaire Ă  un SCI de l’IR et que je deviens locataire dudit SCI, je perçoit indirectement un revenu de propriĂ©tĂ©, ce qui me permettra de facturer des frais dĂ©ductibles, voire de crĂ©er un dĂ©ficit foncier imputable aux conditions de droit commun.

L’ administration ne conteste pas le mĂ©canisme. Ce qu’elle est difficile, c’est la motivation de l’opĂ©ration.

Ĺ’uvre

Dans une dĂ©cision des 9e et 10e rĂ©unions du 8 fĂ©vrier 2019, le Conseil d’État rappelle une fois de plus qu’une telle opĂ©ration est motivĂ©e par une taxe objective exclusivement.

En 1992, le contribuable a acquis une rĂ©sidence secondaire Ă  Biarritz. En 1996, il l’a vendue Ă  son SCI Ă  l’APN Ă  laquelle il a payĂ© un loyer. Il identifie et facture le dĂ©ficit foncier rĂ©sultant de l’entretien et travaux de rĂ©paration.

L’ administration constate un abus de droits : la seule motivation du contribuable est de contourner l’application de l’article 15 II CGI.

La chose la plus surprenante est que le contribuable devra se rendre au Conseil d’État pour entendre ce que ce dernier rĂ©pète depuis plus de 40 ans !

Un argument pourrait suggĂ©rer qu’il avait rĂ©ussi : le SCI avait Ă©tĂ© formĂ© plusieurs annĂ©es avant l’acquisition de la rĂ©sidence secondaire et dĂ©tenait Ă©galement un bien immeuble important qui a Ă©tĂ© louĂ© Ă  des tiers dans des conditions normales (voir en ce sens : CE du 27/06/1990, n° 57559).

Mais si la fictive de la sociĂ©tĂ© ne pouvait pas ĂŞtre une contrainte, la fraude de la loi le pourrait. Les Ă©lĂ©ments choisis par le Conseil d’État sont les suivants :

— les travaux Ă  l’origine du dĂ©ficit foncier ont Ă©tĂ© initiĂ©s immĂ©diatement après le transfert de propriĂ©tĂ© et ont Ă©tĂ© financĂ©s par l’associĂ© sur le compte courant : l’associĂ© qui dĂ©tenait auparavant la rĂ©sidence principale pouvait financer directement les travaux, sans avoir besoin de la capacitĂ© de financement de l’entreprise,

— le loyer correspond au montant de l’Ă©chĂ©ance du prĂŞt contractĂ© par SCI pour l’acquisition de la deuxième maison avant le travail et a Ă©tĂ© sous-Ă©valuĂ© compte tenu des travaux importants effectuĂ©s. La sociĂ©tĂ© ne s’Ă©tait pas comportĂ©e comme si le bail avait Ă©tĂ© accordĂ© par un tiers, l’effet dĂ©sirĂ© Ă©tant de sous-estimer les revenus pour augmenter le dĂ©ficit foncier.

MĂŞme si le loyer lui est accordĂ© conformĂ©ment au marchĂ© immobilier, l’administration considère qu’une telle opĂ©ration constitue un abus de droits (Rescript 2008/7).

Conclusion : passez votrechemin.